mardi, décembre 26, 2006

Noël en images

Afin de se mettre dans l’esprit des fêtes rien n’est plus indiqué que les décorations traditionnelles. Voici donc une partie de ma chambre toute bien décorée de guirlandes! Remarquez le petit sapin! De plus, la petite tache sur le mur du fond en haut et à gauche de la fenêtre ce n’est pas de la saleté…c’est mon bébé lézard qui me tient compagnie depuis plusieurs semaines déjà. Pardonnez-moi pour la vaisselle non lavée dans le bac!





Surprise! Je vous présente Yaye joliment coiffée pour les Fêtes et prête pour aller festoyer avec les copains. Il faut cependant spécifié qu’il n’est que 7h le matin et que je viens d’être tirée du lit! Alors que pensez-vous de mes tresses?







Voici deux de mes amis au moment où nous revenons tout juste du marché où nous avons fait l’acquisition de trois pintades. Personnellement, je trouve que ça donne un look à la moto! Pauvres petites la tête en bas comme ça…ce n’est pas bon pour la circulation sanguine. Notez que la photo a été prise juste en face du bureau.






Cœurs sensibles s’abstenir. Il faut procéder au sacrifice de ces volatiles. Pour ce faire il faut bien les immobiliser : un pied sur les pattes, l’autre sur les ailes. D’une main on tient fermement la tête et de l’autre on tranche la veine jugulaire avec un couteau préalablement bien aiguisé.











Comme il s’agit d’un sacrifice, la personne qui pose le geste doit d’abord se purifier elle-même de la même manière qui précède l’une des cinq prières quotidiennes. Elle se lave donc les pieds et les mains adéquatement et lors du sacrifice fait une courte prière. Ensuite, il est important de laisser l’animal se vider de son sang. Cela prend environ cinq minutes pour une pintade.








Une fois bien mortes, c’est le moment de déplumer! On trempe donc les bêtes dans de l’eau chaude et on arrache par poignée toutes leurs belles plumes.















Le résultat ne se fait pas attendre : une belle pintade toute nue! Nul doute qu’il est maintenant possible de constater la véracité de l’expression « avoir la chaire de poule »!

















Je ne sais pas pour vous, mais généralement je ne mange pas les pattes de mes poulets! C’est la même chose avec les pintades…donc on coupe la tête et les pattes puis on enlève les viscères. C’est décidemment long un intestin!











Après cette étape, les hommes cèdent la place aux femmes qui se mettent aux fourneaux. On badigeonne bien la viande et on la fait revenir dans l’huile. Les facilités sont très différentes de celles du Canada…ici on prépare constamment tous les repas sur le charbon.






Il faut s’assurer que la viande soit bien saisie et ensuite on recommence le processus en ajoutant de l’eau afin de créer le même environnement que celle d’une cocotte. On brasse le tout de temps en temps et lorsque la cuisson est pratiquement terminée on ajoute les condiments.

















Voilà le résultat obtenu lors des dernières minutes de préparation. J’entends d’ici mon ventre qui gronde! Miam!











Nous nous installons tous autour de la table prêts à attaquer à belles dents la nourriture qui s’offre à nous. J’ai bien mérité un tel délice! Il est minuit!









L’assiette finale est telle que présentée ci-contre (voici la plus petite des assiettes). Comme nous avions préparé trois pintades, nous avons faits trois assiettes. Les gens se lavent bien les mains et nous mangeons bien sûr dans les assiettes communes. Moi qui aime me licher les doigts…je le fais ici à chacune de mes bouchées! Comme accompagnement, il y a des la salade, des petits pois, des carottes, du concombre, des bananes plantains et du pain. Vraiment succulent!






Finalement, je termine ma soirée chez des amis. Me voici en compagnie de mon meilleur ami (Ousman N’Diaye) aux petites heures du matin. Joyeux Noël Yaye !

Semaine 10 : Joyeux Noël

Des pintades bien sacrifiées

Les deux premières journées de ma semaine furent consacrées à la préparation de la tenue d’une nouvelle activité : une séance de formation de trois heures sur le « focus group » appelé régulièrement groupe focalisé ou groupe de discussion dirigé. Étant l’investigatrice d’une telle séance par la mise en place d’une nouvelle stratégie de recensement des besoins (le temps manque pour mener les enquêtes par questionnaires habituelles), je devais être l’animatrice de cette session de travail et par conséquent responsable de sa préparation. J’ai donc rédigé un court document d’appui pour les agents de terrain et les superviseurs en alphabétisation qui seront lors de la tenue des séances en tant que telle les modérateurs. Ceux-ci ignorants de cette méthode de recherche, je devais bien les renseigner quant à leurs rôles respectifs de même que les sensibiliser au processus de production d’un guide d’entretien (script). Nous élaborerons celui-ci lors d’un second atelier dans les prochaines semaines.

Je ne suis moi-même pas une experte de la matière, mais je dois dire que c’est lors d’un tel moment que je sais apprécier mes expériences parascolaires ainsi que ma parole facile. J’ai déjà été observatrice de groupes focalisés lors de mon implication dans le Centre de consultation en entreprises de l’université (CCE) et ma grande « parlotte » au téléphone m’a également amené à être moi-même une participante. Les enquêteurs téléphoniques me trouvant sympathique m’avaient invité à prendre part à certains de ces ateliers. Si vous trouvez que le réseau de transport en commun de la Capitale (RTC) offre un meilleur service à la clientèle…c’est grâce à certains de mes commentaires!

Suite à ces deux journées de travail intense, j’ai décidé de m’accorder un petit congé. Comment occuper son temps libre à Bougouni? En allant dans un salon de coiffure! Dès 10h le matin je me suis présentée à une professionnelle afin que celle-ci fasse de ma tête un chef d’œuvre tressé. J’ai passé la journée entière à me faire tirer les cheveux de tous les côtés, à me dandiner sur mon derrière, à me demander où est-ce que je pouvais me mettre, à serrer les dents de temps en temps, à me torde le cou en tout sens, à avoir les pieds qui engourdissent et le dos en compote…vraiment ce fut merveilleux! Nous avons terminé ma nouvelle coiffure à exactement 19h tapant juste à temps pour retourner au bureau visionner mon feuilleton quétaine préféré : Barbarita. J’ai par la suite reçu les éloges de tous, enfin je me ralliais à la mode malienne. Me voilà donc transformée en bourreau des cœurs! Je suis moi-même très satisfaite du résultat et c’est de ma propre initiative que j’avais entrepris une telle démarche. Bref, me voilà toute belle pour les Fêtes!

Le jeudi fut consacré à la tenue de l'atelier sur le groupe focalisé et à un après-midi relaxe qui a été bien mérité. Je suis donc retournée à mes activités régulières le vendredi, mais je ne fus pas très productive en raison de ma sortie de la veille. Un de mes amis avait passé près d’une semaine entière en brousse dans un de ses villages et n’en pouvant plus avait décidé de revenir en ville pour se changer les idées. Nous avons donc été souper au restaurant (ceci étant synonyme de poulet et frites!) et deux de nos amis nous ont rejoint par la suite autour d’une petite bière (oui! oui!) pour ceux qui consomment de l’alcool évidemment. La soirée fut très joyeuse et la musique très acceptable! La plupart des gens d’ici sont des accrocs inconditionnels de Céline Dion et de Garou donc mis à part la quantité monstre de chansons interprétées par ces derniers, j’avais le pied qui tapait le sol. Cependant, vous connaissez sans doute l’apothéose de ces deux artistes « Sous le vent ». Je fis un duo très apprécié de tous avec un de mes amis sur cet air, je dois pour cela remercier ma mère et le poste de radio CITF Rock-détente pour m’avoir donné l’opportunité de connaître par cœur les paroles de cette chanson et d’avoir ainsi pu me livrer à une telle performance.

J’anticipais depuis un certain temps la soirée du 24 décembre qui pour moi est le moment réservé à la célébration de Noël. Les Musulmans ne fêtent pas ce jour et les Chrétiens ne représentant que 1% de la population malienne, je pensais bien être plutôt seule pour cette soirée. Par contre, ce n’était sans compter sur la chaleur et l’hospitalité de ce peuple! Un de mes groupes d’amis désirant chasser ma nostalgie et me procurer un sentiment « de famille » m’a préparé toute une belle soirée.

Dès la fin de la journée, au petit soir, je suis partie en moto avec l’un d’eux faire l’acquisition de belles pintades bien vivantes. Ayant déjà exprimé le désir d’assister et de participer à la préparation d’un tel met, il a voulu faire tel que le géni qui sort de la lampe et exaucer mon souhait. Il m’a donc fait un cours de A à Z sur le sujet. Ensuite, j’ai participé avec les femmes à la cuisson de la viande et à la préparation des condiments. Ce fut vraiment très agréable!

Dans la soirée le reste des membres de ce groupe d’amis s’est joint à nous pour me tenir compagnie et festoyer. Nous avons attendu jusqu’à minuit sonnant avant de déguster le fameux repas. Tout a donc été fait dans les règles de l’art. De plus, à ce même instant mon téléphone se fit entendre au son de « I wish you a merry Christmas » sélectionné spécialement pour l’occasion, Stéphane me souhaitait un « Joyeux Noël! ». Alors quoi demander de plus?!

Apprentissage du moment : Il existe encore des personnes qui donnent pour le simple plaisir de donner.

samedi, décembre 23, 2006

Semaine 9 : Boss

Réunionite aiguë

En cette semaine, le bureau de Bougouni retrouva son maître. Délaissé par ce dernier depuis son accident de moto et la fracture qui s’en résulta, c’est avec chaleur qu’il a ouvert ses portes afin de laisser pénétrer en son sein le seigneur des lieux maintenant nanti de deux jambes métalliques supplémentaires ayant comme fonction de faciliter ses déplacements. C’est à mon tour de souhaiter : « Meilleure santé! ».

Les lieux de travail fourmillèrent de nouveaux visages désireux de venir à leur tour offrir leurs bénédictions et leurs salutations d’usages à celui qui avait été absent à ce jour depuis plus d’un mois et demi. Ce défilé ne nous empêcha pas de vaquer à nos occupations quotidiennes et de mon côté je me suis trouvée plutôt contente de pouvoir enfin valider mon travail.

Jusqu’à maintenant j’avais travaillé de façon autonome acquérant les autorisations quand il s’en avérait nécessaire, mais j’étais dans l’incapacité d’obtenir des réponses à quelques questions qui me trottaient en tête. Je raffole de cette liberté d’actions qui laisse place à la réflexion. Je suis une exécutante hors pair dans la mesure où je m’assigne moi-même la consigne d’exécution! Cependant, un minimum d’encadrement s’impose dès lors que je désire parvenir à des résultats pertinents. Mon patron consacra donc un après-midi entier à moi seule accompagnée de mes interrogations. Lors de cette rencontre, je fus également en mesure de lui faire part de l’avancement de mes différents projets et nous avons convenu d’un calendrier pour les prochaines activités.

Le lendemain, une seconde rencontre fut tenue. Cette fois-ci, elle rassemblait toute l’équipe de Bougouni : les agents terrains, les superviseurs en alphabétisation et un stagiaire malien. Le but poursuivi était l’établissement de la planification trimestriel des activités. Nous y avons mis la journée!

Le surlendemain fut monopolisé par une troisième réunion visant la réalisation d’un exercice d’équipe. Cet exercice extrait du cadre de mesure de résultats du matériel agricole se révéla quelque peu pénible pour mes méthodes de travail occidentales. En fait, ce n’est pas tant la technique en elle-même que le discours qui la soutien qui m’ennuya. Lorsqu’un Malien fourni des explications, il ne se contente pas de synthétiser dans un premier temps et d’ensuite élaborer plus en profondeur dans le cas où l’incompréhension demeure. Il souhaite mettre toutes les chances de son côté dès le départ, et c’est dans les moindres détails, étape par étape, pas à pas qu’il chemine dans les méandres de ses dires. Je suis naturellement une personne qui comprend généralement assez rapidement et à de nombreuses reprises j’aurais aimé appuyer sur la touche « forward » et entendre la version qui m’était débitée en accéléré. Cette lenteur avait pour conséquence de non seulement m’assommer, mais également de me faire perdre de vu l’information que je désirais connaître.

Ces trois journées de réunions m’ont fait réellement sentir la différence dans l’exécution d’une tâches quelle qu’elle soit. Il n’aurait jamais été toléré dans mes équipes de travail à l’université de consacrer 8 heures d’affilées à un seul résultat ou plutôt disons que ce même résultat aurait été atteint en 3 heures. Certes la réunion aurait été moins humaine en axant les priorités sur les tâches à exécuter, mais tous auraient été libérés plus tôt! Je me suis alors demandé qu’est-ce qui était le plus favorable? Prendre le thé et jaser de la famille pendant une réunion ou le faire dans un temps séparé? Cela toujours en gardant à l’esprit que les intéressés veulent échanger de telles informations personnelles, ce qui est nécessairement le cas ici. Probablement que le mélange « travail-vie privée » est le plus adéquat puisque justement ce dernier concept est absent de la culture!

Apprentissage du moment : La couleur des paroles n’est révélatrice que si l’oreille qui les accueille est issue de cette même couleur.

samedi, décembre 16, 2006

Semaine 8 : Médicaments

Une pilule une p’tite granule!

En ce lundi matin, je me levai avec comme première activité de la semaine un tour à la pharmacie. Six jours d’antibiotiques n’ayant pas suffi à combattre la bactérie, je devais aller chercher du renfort. Trois autres journées passeront et je serai dans l’obligation de reprendre cet exercice. Devenue une habituée de l’endroit, je plaisante ouvertement avec le médecin-pharmacien et je le taquine en remettant en doute les vertus de ses produits. Produits en provenance de la France! Tout au moins, il semble compétent dans son domaine et je lui attribue ma confiance.

Il faut savoir que les médicaments sont souvent perçus comme un remède contre tout. Les gens en consomment une quantité à tuer un cheval dès les premiers malaises. Malaises diagnostiqués par eux-mêmes. Un peu de fatigue, un stimulant, un début de maux de tête, un analgésique, un brûlement d’estomac, une pilule…il y a des médicaments pour tous les maux, pour toutes les douleurs même pour ce qui n’existe pas. Aussitôt que j’affirme me sentir quelque peu souffrante, une question m’est lancée : « Tu as pris un comprimé? Il faut prendre un comprimé. »

La consommation de médicaments est certes aberrante, mais pour qu’une personne puisse consommer, elle doit d’abord acheter. C’est à ce niveau qu’il y a un problème réel. Nul besoin de faire comme moi et de courir à la pharmacie du coin. Placez-vous debout devant votre porte et patientez 10 minutes. Les vendeurs se promènent en tenant bien équilibrés sur leur tête des paniers débordant de produits dits guérisseurs. Quelle en est la composition? Quelle en est la posologie? Quels en sont les effets? Aucun moyen de le savoir. Guérissez ignorants.

Une autre cause de ce comportement provient de la source même : les médecins. Ceux-ci alimentent cette tendance à la surconsommation. Suite à une consultation, le patient est certain de tenir bien en main une ordonnance quelconque. Sur celle-ci, il n’y a pas un ou deux médicaments prescrits, mais plutôt une bonne dizaine. Vous rappelez-vous de mes maux de dents? Bien juste pour cela, j’avais six produits différents d’indiqués sur mon petit papier bleu signé et étampé. Les gens limités par leurs moyens financiers et leur méconnaissance ont parfois tendance à ne se procurer que le premier et le dernier de la liste d’épicerie qui vient de leur être confiée. Croisez les doigts que vous venez de choisir ceux qui sont réellement essentiels à l’amélioration de votre état de santé.

Dans mon cas, les antibiotiques s’avéraient nécessaires. Certains m’ont demandé les raisons possibles de l’apparition de tels furoncles. La cause la plus probable est que je me serais épilée peu de temps avant de prendre ma douche. La bactérie est contenue dans l’eau et ma peau fragilisée fut beaucoup plus facile à pénétrer.

Apprentissage du moment : Il faut peu pour causer de bien grands maux.

lundi, décembre 11, 2006

Semaine 7 : Aïe!

La Bossue de Bougouni

Certes je ne vis pas dans le clocher d’une église en plein cœur de Paris, mais la Terre est une surface bien petite et pendant quelques temps le bureau de Bougouni se transforma à mes yeux en une cathédrale. Mon premier réveil de la semaine fut douloureux. Sous mon aisselle gauche je pouvais sentir des renflements sensibles au toucher. Quel est le moustique assez stupide pour me piquer à un tel endroit? Mauvais diagnostic. Je l’appris à mes dépends la nuit suivante : forte fièvre accompagnée d’un mal insupportable. Je me levai très tôt le lendemain et avant même de commencer la journée, je suis allée trouver un responsable pour lui dire : « Je pense qu’il serait favorable que j’aille consulter un médecin. »

En moins de 10 minutes, j’ai les deux pieds dans un centre de santé. L’endroit n’a aucun charme rassurant et par extension j’attribue cette impression à celui qui est présentement entrain de me demander mon âge, mon lieu de résidence, mon occupation… Où est la sortie de secours? Encore une fois, je ressens cruellement le manque d’intimité. Au Mali les problèmes des uns deviennent naturellement les problèmes des autres. Les amis proches et les membres de la famille interviennent régulièrement dans les histoires de couple, dans l’éducation des enfants ou dans tout autres domaines qui pour nous, occidentaux, relèvent de la vie privée. À l’opposé, un ami qui s’abstient de mettre son grain de sel est jugé ici comme ayant manquer à son devoir. Je me trouve donc assise dans une pièce dont la porte est fermée, mais dont la fenêtre est grande ouverte. Tout ce que je peux raconter peut être entendu et cela sans aucun effort de concentration par celui ou celle qui paisiblement attend son tour dans la salle adjacente.

Il est rassurant d’avoir la conviction que quelqu’un viendra te réveiller un matin où tu ne t’es pas levé, de savoir qu’aux moindres symptômes de malaise quelqu’un prendra soin de toi, mais il est aussi très pénible de ne pas pouvoir être seule. Aussitôt que je suis tombée malade, j’ai reçu la visite de tout mon entourage. « Meilleure santé! » Telle est la bénédiction que je recevais de chacun. Cependant, j’avais de la misère à me supporter moi-même alors je ne vous dis pas la tolérance que j’ai essayé de démontrer envers les autres. « La sainte paix…vous connaissez?! »

Je ne ressens ni honte ni gêne à vous dire qu’à mon retour de la clinique j’ai fondu en larmes. Larmes d’épuisement, larmes de douleur, larmes d’inquiétude. Les gens me dirent de sécher ces larmes et de me montrer forte. Qu’est-ce qu’être forte? Pour eux le fait que je pleure signifiait qu’ils n’avaient pas eu un bon comportement envers moi. Ils prenaient ma peine pour la leur. Toujours ce besoin de partage. Il n’est donc pas bien perçu d’exprimer une telle émotion en public. D’ailleurs les femmes n’ont souvent pas le droit d’émettre le moindre son à l’accouchement. Soyez fortes! De mon point de vue, c’est une faiblesse de dissimuler nos états d’âme. Être forte est être capable d’assumer nos sentiments, de les afficher et d’en discuter. C’est également un soulagement de se laisser aller et cela procure un apaisement. C’est sain. Ni l’un ni l’autre nous avons tord, ni l’un ni l’autre nous avons raison. Comprendre l’un et l’autre est ce qu’il y a de plus difficile.

Mes maux étaient causés non pas par un, mais par une série de furoncles. J’en avais déjà vu plusieurs l’été dernier chez les enfants en Inde, seulement j’ignorais qu’ils en existaient différents types. Je me retrouvai avec un bout de papier à la main me donnant l’autorisation d’acheter des antibiotiques. Direction la pharmacie. Munie de mes gélules rouges et jaunes, je regagnai mon lit pour le reste de la journée. La semaine fut exemptée de sommeil, le mal progressait. Le plus gros de mes furoncles atteignit la dimension d’une balle de ping-pong.

Malgré cet handicap, je suis parvenue à mener à terme la journée de réflexion avec les agents du bureau quant à la stratégie à adopter pour le recensement des besoins de formation des femmes villageoises. J’ai d’ailleurs reçu une bonne collaboration et je suis bien satisfaite de ce qui en a résulté. Le reste du travail fut mis quelque peu de côté. Mes visites sur le terrain annulées, le repos occupa tout mon temps. Je me sentais coupable d’être si peu productive, je voulais accomplir mon travail. Pourquoi toujours un tel besoin de performance?

Ce n’est que vendredi en soirée que le premier furoncle se vida et j’affirme ne jamais avoir vu quelque chose de plus dégoûtant sortir de mon corps. Beurk! Liquide beige mêlé de sang épais et visqueux…de quoi couper l’appétit de quiconque. Enfin, je me sentis un peu mieux.

Apprentissage du moment : Il faut souffrir pour être belle.